jeudi 19 janvier 2012

Jeudi 5 Janvier : QUE DIT L'HORIZON ?


 Albatros planant devant les falaises d'Entrecastaux (Amsterdam)
 On est vraiment loin de tout !
 Les arrivées sur les districts sont toujours chargées d'émotion.
 Un peu d'espace pour se dégourdir les pattes !
 3 zigotos un peu perdus...
 Anse des pachas, Kerguelen.
 Eléonore et Adrien.
 Amsterdam.

Avec Adrien et Cédric.


Regarder l’horizon, bien d’aplomb, et le scruter, plus que de raison : Qu’y lit-on ? Juste le rythme des saisons, le baromètre, ses variations, ou une ligne de fuite bien droite, où semble vibrer l’air chaud, presque moite ? Peut-on y voir autre chose ? Le filtre de ses émotions, son humeur en toile de fond ? Le même paysage peut en effet, un jour ou l’autre nous sembler, triste et froid, sec et gris, ou bien cacher autant de promesses que de maquis.
Regarder l’horizon, bien d’aplomb, et laisser ses yeux se perdre. On peut alors se sentir bercer par le murmure, lent et discret, de la très vaste nature, et même imaginer, après quelques temps, en faire partie, en être un élément. On croirait s’y oublier, on voudrait s’y faire tout petit, et n’être plus remarqué, que par une ou deux souris, hardies. Quelle étrange sensation, de vibrer alors au diapason, de ce paysage vivant, de ce décor chatoyant.
Notre long périple austral nous offre chaque jour, cette possibilité que trop souvent l’on oublie. Celle de contempler ce qui nous entoure, d’y voir la vie, son cycle, son équilibre, les prouesses de l’adaptation, les difficultés de la survie, l’interdépendance et la fragilité ! Toute la journée on sillonne l’océan, sans cesse changeant. Parfois houleux, parfois, tranquille, toujours différent. Abris des petits, terrain de jeux des plus gros, il est tout à la fois barrière et refuge, tranquillité ou déluge. En plus d’être une pouponnière géante, il régule notre climat, atténue ses variations. Il nous permet aussi d’accéder à notre destination, qui elle ne varie jamais : nous voici donc aujourd’hui sur l’île de la Possession!
La petite équipe qui débarque est hétéroclite : en voici les membres, dans l’ordre d’arrivée à Crozet : un ancien sénateur, le préfet Gaudin, enseignant devenu ingénieur puis politicien, le pas vif, la mine enjouée, même s’il a parfois besoin, d’un peu d’aide sur ses dossiers, et d’une bonne ceinture de soutien, car les banquets du sénat, semblent chargés, voire un peu gras ! Après M. Gaudin, voici M. Chapuis, petit monsieur un peu vieux, mais terriblement dynamique : il a fait partie, c’est magique ! de la 1è mission à Crozet (1961), il y a un paquet d’années (50). Depuis il a sillonné le monde, en sa qualité de topographe de l’IGN, on lui a confié de grandes cartes à fabriquer, tout un monde à dessiner ! Arrivent ensuite Eléonore et Adrien, respectivement journaliste et caméraman. Ils ont 37 et 27 ans et vont réaliser pour la chaîne parlementaire un reportage sur les PARTEX (les militaires en participation extérieure qui travaillent pour les TAAF sur les bases). Avec eux, on se marre toute la journée, ils sont très complices et les blagues fusent ! Ils ont eu l’habitude de réaliser des reportages un peu partout : SMLE (sous-marins lanceurs d’engins), guerre en Afghanistan, missions commandos, et j’en passe ! On entretient avec Adrien, une similitude étonnante : même âge, même tête, même gabarit, on adore la montagne et la Bretagne (sa copine vient de Groix), on fait du kite et de la photo et on aime le jus de tomate ! C’est assez marrant…Il me donne plein de contacts pour le secours en montagne et la médicalisation de tournages au bout du monde ! Viennent ensuite Klavdij Sluban et Laurent Tixador, deux artistes de 50 et 30 ans environ, lauréats d’un concours du ministère de la culture. Photographe et plasticien, ils vont passer 2 mois ½ à Kerguelen pour tenter de livrer leurs impressions personnelles de ce drôle de monde parallèle ! Ils nous font partager leur regard décalé, tout neuf et affûté ; avec eux on peut réussir, parfois, à voir un peu différemment cet environnement étonnant ! Les discussions sont souvent passionnantes, car ils sont accessibles et gardent les pieds sur terre, mais pas trop, juste ce qu’il faut. On a aussi avec nous Didier, un météorologiste réunionnais qui va aller ajuster certaines installations à Kerguelen puis très vite retourner sur son île où il pourra enfin courir à nouveau ; c’est un grand marathonien (2h30) qui a besoin de courir 180 km/semaine pour se maintenir à son niveau…incroyable ! Il est aussi arrivé 30è et des poussières sur la diagonale des fous, l’ultra trail le plus relevé au monde (avec l’UTMB) !! Nous trouvons également dans nos rangs Cédric Marteau, le plus jeune directeur d’une réserve naturelle nationale, à 33 ans ! Il est biologiste, très au point sur les questions de préservation environnementale et animale ; il coordonne les efforts de la réserve naturelle des TAAF, et est déjà riche d’une foule d’expériences sur ces îles ! Matilda nous accompagne aussi ; elle a été tout récemment embauchée par les TAAF pour s’occuper du tourisme dans les districts ; elle est prof d’histoire géo et a la bougeotte : à 29 ans, elle a habité à Djibouti, en Polynésie, au Burkina, en France, à la Réunion ! Elle découvre les îles australes pour la première fois et essaie de retenir le maximum d’informations car dans 2 mois ½ il y aura des touristes à bord, curieux et exigeants !
Voici un premier aperçu de mes compagnons de voyage…la liste est encore longue ; je vous en reparlerai.
Nous sommes actuellement au mouillage à une centaine de mètres au large de la base Alfred Faure, refuge des habitants temporaires de l’île de la Possession sur l’archipel des îles Crozet ; nous y avons passé la journée ! C’était très chouette de retrouver les gens que j’ai connus à OP3 et qui viennent de passer leur premier mois au bout du monde : ils ont l’air de s’être très bien acclimatés, et il semble que la situation soit beaucoup plus délicate à gérer pour les 8 personnes qui vont remonter à bord avec nous demain, après avoir passé parfois plus d’un an sur place ! Mon collège médecin, Philippe, a bien voulu prendre ma place à bord dans la journée pour que je puisse me dégourdir les pattes, c’était super !
Demain, c’est la commémoration officielle, avec le préfet, M. Chapuis, le DisCro,… des 50 ans de présence française à Crozet. Ce sera aussi la fin des opérations logistiques et scientifiques et le départ dans l’après-midi pour Kerguelen (2 jours de mer, souvent forte !).
Alors pour bien m’y préparer je vais faire un bon roupillon (plus réparateur que les précédents je pense, la mer était mille fois moins agitée) en me laissant bercer par Erik Satie…paaarfait !
Bises à tous.
Portez-vous bien.
Martin.

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