mardi 17 avril 2012

OP1 EP2 Les 40èmes sont vraiment rugissants !

Message du commandant : « pour tous les passagers, merci d’arrimer solidement vos affaires personnelles dans vos cabines. »
Le ton est donné ce matin sur le bateau. Nous avons en effet dépassé le 40è parallèle sud cette nuit vers 2h et depuis, l’océan nous fait une petite démonstration de puissance. On comprend très bien qu’ici ce n’est plus vraiment le domaine des hommes. La nature a les pleins pouvoirs et en use allègrement. Très brutalement le vent a tourné et forcit atteignant ce matin 45 nœuds, la mer s’est creusée, a blanchi, et à présent notre fière embarcation, malgré ses 120 mètres de long, est ballotée d’une vague à l’autre. On essaie de s’adapter à bord : le commandant modifie le cap, chacun installe les contre-hublots dans sa cabine, on harnache nos affaires, les bloque au fond des tiroirs, placards ; on installe des baguettes transversales en bois devant les rayonnages des étagères pour empêcher la chute des livres. Ce matin, j’ai été réveillé par la dégringolade de la plupart des affaires dans ma cabine, et par un fracas plus fort encore venant de l’hôpital où la totalité des cartons renfermant les commandes médicales des bases avait glissé en travers de la salle d’examen, bloquant l’ouverture de la porte. J’ai donc récupéré des boots en machine pour ligoter tout ça fermement entre la potence de l’appareil de radio et l’armoire métallique de chirurgie. Je crois que ça tient !
Au restaurant du bord, plus de verre à pied, par contre, tapis antidérapants partout ! Le pont extérieur est aussi fermé aux passagers. Bref, on arrive dans le grand sud, habituellement plus menaçant au mois de mars avril qu’en plein été austral comme lors des dernières rotations !
Paradoxalement, la majorité des passagers avait le sourire ce matin, comme s’ils étaient ravis de découvrir enfin la brutalité sauvage de la mer, qu’on avait dû tant leur vanter avant leur départ. C’est vrai qu’à bord, on a tous embarqué un peu aussi pour se frotter à la légende des mers du sud ! On est servi !
Déjà depuis hier, notre environnement avait un peu changé : le fond de l’air s’était rafraîchi, les oiseaux avaient fait leur apparition, on avait même vu des baleines après le déjeuner, s’apprêtant à sonder une centaine de mètres à l’arrière du bateau.
Et aujourd’hui, nous avons droit à un fabuleux tête à tête avec l’océan, à un spectacle grandiose où l’on se fait tout petit pour assister à ce déchaînement qui nous dépasse et nous fascine. Cette soudaine matérialisation de l’hostilité de ces mers vient rompre la monotonie du transit, le confort de la croisière et nous rappelle les enjeux de notre mission : ravitailler les hommes qui vivent sous ces latitudes, rapatrier les malades et ceux en fin de mission, renouveler les équipes des bases, amener la preuve incarnée qu’ils ne sont pas seuls au monde, qu’ils comptent, leur transmettre leur courrier, leur donner des nouvelles de la Réunion et de la métropole.
C’est aujourd’hui notre dernier jour de mer avant Crozet, et il nous tarde tous de découvrir enfin à l’horizon les reliefs de la première des îles subantarctiques que nous visitons. Voir enfin le ciel se barrer d’un obstacle, un obstacle habité en plus ! Faire route vers d’autres hommes perdus dans cette immensité inhospitalière !
De mon côté, il faut que le travail avance tout de même, donc j’organise cet après-midi les formations aux premiers secours…tant bien que mal ! On essaiera de masser le mannequin sans trop se blesser ni se faire propulser contre les cloisons des coursives ! Ou sinon l’exercice aura rapidement un caractère très réaliste…
Bon, je crois que ce petit billet va s’arrêter là, car j’entends des colis qui glissent dans la réserve de l’hôpital, il va falloir renforcer les boots !

 Arrivée sur CROZET par Pointe Basse
 Idem
 Aussi
 Encore
 Table à carte, à la passerelle
 Crozet, île de la Possession
 Grand albatros.

 Ile de la Possession

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